Oh, il y a aurait beaucoup à dire sur ce schéma. (via http://sebsauvage.net/links/?EO7t7Q)
Il est fondamentalement juste, mais il ne tient pas compte de certaines "subtilités" qui changent tout, ni du fonctionnement réel des institutions.
Je l'ai souvent dit, et je le répète : vous pouvez avoir la meilleure constitution du monde, c'est l'usage qui en est fait qui est garant de la démocratie réelle et de l'équilibre des pouvoirs. La Constitution de l'URSS des années 80 (1986 je crois) était la plus "démocratique" du monde. Sur le papier.
1/ Les rapports de force sont déséquilibrés :
Pouvoirs de destruction mutuels très déséquilibrés : le Président de la République peut -autoritairement et sans avoir à se justifier- dissoudre l'Assemblée Nationale. Mais l'AN ne peut pas renverser le Président (pas de procédure d'impeachment à l'américaine) ; elle ne peut que renverser le gouvernement, mais la procédure est telle, que c'est quasiment impossible. De fait, le fait ne s'est produit qu'une fois sous la Vème République (alors que c'était monnaie courante sous les IIIè et IVè, avec l'instabilité chronique qui en résultait)
2/ Le fait majoritaire vient fausser la lecture de ce tableau.
Dans les faits, les parlementaires adoptent sans bargouiner tout ce que le gouvernement leur demande d'adopter : le Parlement ne discute plus la loi, il l'enregistre. C'est à un tel point flagrant, que l'on voit l'ex-opposition voter pour des projets qu'elle dénonçait avant, et l'ancienne majorité voter contre, alors qu'elle aurait présentée les mêmes quand elle était dans ce rôle...
Bref : les élus ne représentent pas le peuple, ils représentent leur parti ; et quand bien même le parti est en désaccord avec le gouvernement, ils s'écrasent plus ou moins, par "solidarité" avec lui. C'est ainsi qu'on en arrive à des aberrations où des députés qui font juste leur boulot de députés (discuter la loi) sont qualifiés de "frondeurs" sans que cela semble choquer quiconque (http://sammyfisherjr.net/Shaarli/?novJ1w), ou pire, que des députés qui votent contre un projet de loi du gouvernement soient convoqués par le siège du parti auquel ils appartiennent (gouvernement et députés) pour... ben pour se faire engueuler, en gros. (http://sammyfisherjr.net/Shaarli/?NGXCxQ)
Corollaire des 2 paragraphes précédents : le gouvernement peut contraindre l'Assemblée à adopter n'importe quel texte, en mettant en jeu sa démission. C'est le fameux "49.3" dont on a beaucoup parlé il y a quelques temps. (http://sammyfisherjr.net/Shaarli/?KKALMQ)
3/ Une séparation des pouvoirs inexistante.
L'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (intégrée à la Constitution de 1958 via son préambule, mais le saviez déjà wink) le précise bel et bien : "Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution."
De fait, si l'on prend en compte :
La séparation des pouvoirs ne doit plus se comprendre comme la séparation entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire. C'était tout à fait pertinent à l'époque de Montesquieu, où tous les pouvoirs étaient détenus aux mains d'une seule entité (le roi), ça l'est un peu moins aujourd'hui. La séparation existe, mais son rôle de limitation naturelle des pouvoirs entre eux ne fonctionne plus. Ou mal. Parce que c'était ça l'idée à l'origine : on ne sépare pas les pouvoirs pour faire joli, mais on divise "LE" pouvoir entre plusieurs entités qui, défendant leurs intérêts bien compris, œuvrent pour l'intérêt général (ou font moins de dégâts...) car leur pouvoir de nuisance s'annulent mutuellement.
Eh oui : la pensée à la base de cette grande théorie de Montesquieu (qui n'était pas un humaniste philanthrope, mais un bourgeois qui voulait que sa classe accède au pouvoir politique et plus seulement au pouvoir économique, mais je m'égare...), c'est un pessimisme assez fondamental, et une mise en pratique assez pragmatique des défauts de la nature humaine.
N.B. : un point pour finir. Le Conseil Constitutionnel, "juge de la loi", ne peut exercer ce rôle, sauf les cas validés de QPC, qu'avant la promulgation de la loi. Pour ce faire, il peut être saisi par le Pdt de la Rép, le 1er Ministre ou le Pdt de l'une des 2 assemblées et, depuis assez peu de temps finalement, par un groupe de 60 députés ou 60 sénateurs au moins.
Or, le fait majoritaire évoqué plus haut peut conduire les uns ou les autres de ces intervenants à ne pas saisir le CC, soit par "diplomatie de couloir", soit d'une manière plus... autoritaire (http://sammyfisherjr.net/Shaarli/?SaBsEg) et carrément contraire à la lettre de la Constitution.
Encore un mot sur la QPC (question prioritaire de constitutionnalité) : c'est une avancée majeure que l'on doit à ...Nicolas Sarkozy. Ben oui.
C'est le seul cas où l'on peut examiner la validité d'une loi par-rapport à la Constitution après que celle-ci ait été promulguée. Mais les cas de figure sont limités.
Déjà, il faut que la loi mise en cause soit un moyen utilisé lors d'un procès devant l'un des ordres juridictionnel (judiciaire ou administratif) ; il va d'abord falloir examiner le "sérieux" de la requête, c à d si la question se pose vraiment. Si le juge estime que c'est le cas, la QPC est alors transmise, via le Conseil d’État ou la Cour de Cassation, au Conseil Constitutionnel, qui tranchera dans un délai de 3 mois (Cf. points 7 et 10 de cette présentation : http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/root/bank_mm/QPC/plaquette_qpc.pdf)