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  • Violences, bavures : des policiers racontent

    Article très très intéressant à plein de niveaux.

    « Tu veux savoir ce que j’en pense ? Je pense que vous, les journalistes, vous êtes des hypocrites. » Un policier parisien habilité au port du LBD s’agace. « Ça fait des années qu’on l’utilise en banlieue et tout le monde s’en fout. Quand c’est un petit Noir ou un petit Arabe qui en prend une dans la tronche, ça fait jamais les gros titres. Quand c’est un Blanc par contre…

    Un point pour toi.

    Pour Claude, gradé chez les gendarmes mobiles (équivalent pour les militaires des CRS), la mesure va toutefois dans le bon sens. « Dans mon peloton, celui qui tire de sa propre initiative, il prend déjà un grand coup derrière les oreilles. » Chez les gendarmes, le porteur d’un LBD ne tire que sur ordre. Un superviseur désigne la cible et rappelle la zone à viser. Résultat : moins de tirs et moins de blessés. « Le maintien de l’ordre, c’est pas du ball-trap, c’est un truc de pros. On apprend à tenir à distance, à avoir un usage proportionné et gradué de la force… On enverrait pas le service des essences faire la guerre, alors pourquoi déployer des mecs pas formés sur les gilets jaunes ? »

    Ont ainsi été mobilisés dans ces manifestations des policiers de la BRI (brigade de recherche et d’intervention), de la BRB (brigade de répression du banditisme) ou de la BAC, davantage habitués à interpeller des délinquants de plus ou moins haut vol qu’à rester stoïques face à des manifestants.

    Témoignage à rapprocher du fil Twitter de cette policière, que je viens de découvrir via Mastodon. (Attention, certains propos peuvent choquer. C'est une "vraie" flic, et elle pense vraiment ce qu'elle écrit ; je lie volontairement vers son thread du 3 décembre 2018, c'est "intéressant" d'avoir son point de vue). Bref, elle raconte notamment que son métier c'est la BAC, et que le jour de la grosse manif des GJ sur les Champs, on les a appelés de toute urgence ("on ressent la panique et la peur dans leur voix") et qu'ils n'ont pas eu le temps de s'équiper et que de toute façon, ce n'est pas leur métier ("On n’est pas #CRS, le MO on n’en fait pas tous les jours. Mais très vite, on s’habitue, alors même que nos protections sont spartiates voire inexistantes.")

    À entendre plusieurs sources, y compris au sein de la police, l’essentiel des violences serait donc dû à un manque de formation. L’hypothèse est séduisante. Elle a aussi quelque chose d’hypocrite, estiment plusieurs policiers de la BAC : « C’est vrai qu’on pourrait être mieux formés au maintien de l’ordre, mais notre métier, ça sera jamais de barrer une avenue » ; « nous, on va au contact, on interpelle. Et quand on nous envoie dans la mêlée, je peux te dire que c’est pas pour faire de la désescalade. »

    Ça, je le trouve très inquiétant, même si ça ne me surprend pas, ça fait des années que je l'entend : les baqueux se prennent pour des cow-boys.

    Et c'est totalement assumé :

    On demande aux BAC d’interpeller les manifestants les plus violents, mais aussi « tout simplement d’avoir un impact physique, comme dit un policier de la région lyonnaise. Un peu comme un remplaçant du XV de France qui entre en fin de match pour renforcer le pack. »

    Le manque de cohérence et le fait que tout le monde se couvre, c'est pas que dans la police, mais c'est un vrai problème :

    « Les ordres flous, ça a l’air de rien, mais c’est l’un des problèmes principaux dans la police, insiste Maxime. Et les gens le savent peu… »

    Un policier parisien prend l’exemple d’une course-poursuite. « C’est récent, ça s’est passé hier. Je voulais contrôler un véhicule, je mets le gyro et, au lieu de se ranger sur le côté, il accélère. Alors je prends la radio et je demande la priorité sur les ondes. Ça veut dire qu’il y a plus que moi qui peux émettre, les autres sont censés la fermer. Et là j’annonce : “Prenons en chasse un véhicule… délit de fuite… etc.” Réponse du commandement : “Prenez pas de risques”. » Traduction : décidez tout seuls de poursuivre ou non la chasse. « Si ça s’était mal passé, on nous aurait ressorti la bande. “On vous avait dit de pas prendre de risque et patati et patata…” C’est tout le temps comme ça. Tout le monde se couvre et à tous les niveaux. »

    Et inversement, quand un manifestant se prend une grenade de désencerclement en pleine poire, ce n'est la faute de personne, puisque personne ne l'a ordonné...

    [...]

    Le collègue qui te dit qu’il n’a jamais eu le geste de trop, il te ment.

    [...]

    « J’étais arrivé à un stade où plus rien ne me touchait. La misère, le désarroi des gens… Ça ne me faisait plus rien. Je ne sais pas pourquoi… Je ne suis pas très à l’aise avec les psys mais une fois j’en ai parlé avec mon officier. Ça commençait à m’inquiéter. Je m’interrogeais : “Est-ce que je ne suis pas en train de devenir un monstre ?” » On demande à Laurent pourquoi il raconte tout cela au passé. « C’était passager. Aujourd’hui, ça va mieux. Qu’est-ce qui m’a aidé ? Je ne sais pas trop… J’ai eu un enfant il y a un an. Ça m’a remis un peu de réalité. Ça m’a sans doute… comment dire… reconnecté. »

    Je suis profondément convaincu de ça. Que la violence n'est pas inévitable, que les responsables ne sont pas justes les types sur le terrain, mais leur hiérarchie, et au-delà, les politiques qui donnent les ordres ou qui laissent faire. Cela n'excusera jamais les actes de quelques parfaits salauds, rentrés dans la police pour la baston, et ne doit pas faire oublier non plus qu'une majorité de policiers et de gendarmes votent à l'extrême-droite, ce qui ne doit pas être sans conséquence dans leur attitude face aux manifestants.

    Et vous savez ce que j’attends ? Qu'un Préfet de police ait ce courage là :

    C’est le courage qu’avait eu le préfet de police Maurice Grimaud en 1968, en adressant une lettre individuelle à tous les policiers : « Frapper un manifestant tombé à terre, c’est se frapper soi-même en apparaissant sous un jour qui atteint toute la fonction policière (…). Je sais que ce que je dis là sera mal interprété par certains, mais je sais que j’ai raison et qu’au fond de vous-mêmes vous le reconnaissez », écrivait le haut fonctionnaire, qui insistait aussi sur « la sauvagerie de certaines agressions (contre les forces de l’ordre), qui vont du pavé lancé de plein fouet sur une troupe immobile jusqu’au jet de produits chimiques destinés à aveugler ou à brûler gravement. » Les policiers interrogés confirment n’avoir reçu aucune lettre ou message sur le thème des violences de la part de leur hiérarchie durant la mobilisation des gilets jaunes.

    via Seb et Marc

    Fri 22 Nov 2019 01:59:27 PM CET - permalink -
    - - - https://www.la-croix.com/France/Securite/Violences-bavures-policiers-racontent-2019-11-19-1201061323
    management violences_policières
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