Dans le match pour ou contre, Jeanne Guien, philosophe, spécialiste de l'histoire de la consommation, n'y va pas par quatre chemins : "Le consommateur dépense et a l'impression d'économiser. Tandis que l'enseigne prétend perdre de l'argent alors qu'en fait c'est elle qui économise. L'enseigne se débarrasse d'objets qui n'allaient plus rien lui rapporter, voire qui lui aurait coûté parce qu'il n'y a plus de demande pour ces produits, ce sont des invendus. Les enseignes transfèrent sur le consommateur, la responsabilité de la surproduction. C'est toujours résoudre le problème du gaspillage en faisant consommer plus." À Drancy, en moins d'une heure et demie, les dix chariots et leurs surprises sont tous partis.
S'il est possible de nous convaincre de faire un truc aussi pénible que nettoyer notre maison de la cave au grenier, on peut espérer qu'il soit aussi possible de nous persuader de changer nos habitudes de consommation –en ne désirant que des objets qui nous «donnent de la joie», pour commencer. Finalement, ce qui fera vraiment la différence, ce sera notre aptitude à enfin nous détourner de la fast fashion et à nous soucier du type de vêtements que nous achetons.
Eh oui : plutôt que d'apprendre à jeter, nous devrions commencer par apprendre à moins acheter. Pas facile, dans un système où l'on t'explique dès le plus jeune âge que le bonheur passe par l'acquisition de trucs et de machins.
Comment ne pas se faire avoir avec des numéros surtaxés à 0,70 €/min ? Voici la liste des services clients gratuits.
Un excellent -et un peu morose, forcément- article de Gee sur "l'économie des services".
La croissance des services nécessite quant à elle que chaque minute de nos vies soit monétisée, et si possible en parallèle : elle nécessite que nous twittions, tout en regardant une émission de télé, tout en commandant sur Deliveroo, avec dans chaque recoin la verrue publicitaire pour entretenir le mouvement ; elle nécessite l’apparition de boutons pour visionner des vidéos en accéléré, car il n’y a plus assez d’heures disponibles dans une journée pour regarder toutes celles qu’on vous propose à vitesse normale ; elle nécessite, de manière générale, que tout s’accèlère, que tout passe vite pour qu’une consommation en suive une autre avec le moins de délai possible parce que, plus que jamais, le temps, c’est de l’argent. Notre temps, c’est leur argent. Et vous y trompez pas, les barrières de l’acceptable tomberont une à une à mesure que se réduiront les marges de manœuvre pour continuer à croître. Il faut que nous dormions moins, que nous organisions toute activité sociale autour de la consommation, l’apothéose étant atteinte avec les centre commerciaux géants qui poussent comme des champignons, véritables temples érigés à la gloire de la consommation comme fin en soi.
J'ai une théorie assez paranoïaque à ce sujet : à votre avis, pourquoi la fameuse "première partie de soirée" à la téloche commence-t-elle de plus en plus tard ? Quand j'étais gamin, le film du samedi soir commençait à 20h50 ; aujourd'hui, ta série ne commencera pas avant 21h10, voire 15. Avec au moins 2 tunnels pub de 15 minutes par épisode. Résultat : 3 épisodes de 43 minutes, ça t'amène jusqu'à 23h40. Je considère que c'est un réel problème sanitaire... et tout le monde s'en fout.
Le réflexe de survie dans un tel monde : quel que soit ce qu’on me propose, la réponse est non par défaut. Non à tout, même à ce qui m’intéressent potentiellement : si ça m’intéresse, c’est non, puis je recherche sur le net à tête reposée, pour voir si éventuellement c’est oui. Et c’est rarement le cas. Les rares fois où j’ai dérogé à cette règle, je l’ai regretté. Parce que c’est bien la dernière façon dont peut espérer croître l’économie du service : en tablant sur la pulsion, sur l’absence de réflexion, bref sur le consentement le moins éclairé possible.
Bref, on nous prenait déjà pour des cons, on est en plus des vaches à lait et en même temps des moutons à tondre.
Je ne peux que donner raison à Gee dans ses conclusions.
via Seb
Lu en diagonale, à cause du titre.
La marchandise, c’est donc comme un truc à deux faces : pile, valeur d’usage, face, valeur d’échange. Et comme ces pièces, les deux faces ne se regardent pas, elles s’ignorent : ce que tu fais avec le truc que tu as acheté une fois que tu l’as acheté, globalement, le capitaliste s’en tape.
[...]
Parce que, lorsque je m’attaque à la face « usage » du mot « consommation », je formule une critique qui n’a pas grand’chose à voir avec le capitalisme en vérité, ou très très indirectement. Je peux très bien imaginer cet « usage » dans un autre système que le capitalisme. Au hasard, je peux très bien imaginer que dans un système économique de type communiste, la production du produit « Star Wars » continue
[...]
Sauf qu’au bout d’un moment, le projet politique porté par ce type de critique ressemble à un horrible ascétisme ennuyeux à crever. Un projet où on s’interdit de faire telle ou telle chose (7), et au final un max de choses, parce qu’on fait à tort de l’acte de consommer le centre autour duquel tout le système gravite, alors qu’il est périphérique : c’est un peu comme dire que le soleil tourne autour de la terre. Et ça ressemble beaucoup à la critique écologiste du « superflu » qui détruit la planète… D’ailleurs concernant la critique de la consommation d’un point de vue écologiste, je vous renvoie à ce très bon spot vidéo :
https://invidio.us/QqnC2avyNAk?feature=oembed&dark_mode=true&local=1&nojs=0&player_style=youtube&quality=dashOr que des pauvres fassent « de nécessité vertu » et trouvent dans le peu de marge de manœuvre budgétaire qu’ils ont, un moyen de boycotter tel ou tel truc dans le cadre d’une action collective de boycott (8), très bien. Mais il s’agit alors d’un moyen d’action et non d’une fin en soi, ce qui est très différent. La critique de la consommation, en revanche, tend à confondre moyen et fin, parce qu’elle repose elle-même sur une confusion fondamentale.
Enfin, si j’ai pris l’axe anticapitaliste comme fil conducteur de mon analyse, cette dernière pourrait complètement s’enrichir d’une perspective féministe (la figure par excellence du consommateur méprisé, de la cible aliénée de la publicité, c’est la fameuse “ménagère de plus de 40 ans”, évidemment parce que 80% du travail domestique reste effectué par les femmes, travail qui inclue le fait d’aller faire les courses pour le ménage), queer (le stigmate qui entours le souci de son look, la “vanité” des paillettes, des belles sapes, des strass, volontiers réapproprié et retourné par les luttes LGBTQI+), antiraciste (qu’on pense à la figure de “l’Africain qui se contente de peu” et son exotisation délirante, ou encore une fois au survêtement trop cher pour un Noir ou un Arabe qui endossent volontiers en france le rôle du “mauvais pauvre” et des classes dangereuses), ou même antivalidiste. Si ce texte pouvait inspirer d’autres articles avec ces perspectives pour “axe principal” ce serait génial.
S’attaquer à la consommation d’un point de vue critique, c’est risquer de se diriger “naturellement” vers une analyse moraliste (c’est-à-dire dénuée de toute considération stratégique) et de lancer ensuite des anathèmes très mal reçus (et à raison) par des gens qui perçoivent aussi le plaisir évident (ou tout simplement l’usage positif) qu’ils tirent de leur pratique « à la con ». Bref, en terme de propagande (diffusion de nos idées), c’est plutôt catastrophique.
Mais c’est aussi se placer, en termes de perspectives d’actions, bien en deçà de ce qu’il est possible de faire : dans un système capitaliste, la marge de manœuvre du capitaliste (propriétaire des moyens de productions) est infiniment supérieure à celle du simple consommateur, dont la « liberté de choix » en tant que consommateur est bien faible. S’en prendre prioritairement au consommateur, c’est tentant parce qu’on le côtoie directement, on en est un également, là où les bourgeois en réalité sont très inaccessibles (9) ; et aussi parce que c’est se donner l’impression d’une possibilité de subversion « à portée de main » qui permet d’esquiver bon nombre des difficultés de l’organisation collective (de type syndicale par exemple). Mais c’est pourtant bien à la bourgeoisie que l’on veut s’attaquer lorsqu’on entend diffuser nos idées. Or, formuler une critique dont elle n’est pas au centre risque bien plutôt de détourner d’elle les personnes touchées par notre propos (10), plutôt que de les amener à s’attaquer à la bourgeoisie en tant que classe. Et de fait, la critique de la consommation n’est pas l’apanage de l’anticapitalisme, elle est tout autant un outil du fascisme ou du citoyennisme.
Y a pas un nous consommateurs innocents magiquement flottant au dessus des eaux du Capitalisme, c'est un système. Sinon on aurait gagné depuis longtemps. Vu qu'on est plein. Et pas eux.
[...]
Le schème du besoin, la question même du besoin, de l'estimation politique du besoin a été un tabou majeur pour la part du mouvement ouvrier qui a eu le manche pendant des decennies: fallait juste de plus hauts salaires pour acheter deux trabans au lieu d'une.
J'exagère même pas: après des années de réflexion et d'action du mouvement ouvrier sur la consommation, via les coopératives d'achat, par exemple, on a littéralement singé l'ideal bourgeois de consommation, au fond. Et laissé la question du besoin aux mouvements lifestyle.
[...]
Le fantasme aliéné qui voudrait séparer si fort la consommation de la production, comme si la sphère politique se limitait à la décision de production, le reste étant la pleine liberté du salarié de dépenser à son envie son salaire est un leurre.
via Je sais pû ki
Il ne faut pas s'arrêter à Amazon : ce qui est en cause ici, c'est le principe même d'une société où l'on t'explique qu'il faut consommer pour être heureux.
A mettre en parallèle avec http://sammyfisherjr.net/Shaarli/?gnhXfw...
« 0 % des sites étudiés indique la justification des prix barrés sur les pages des promotions. »
via Kevin
La "woman tax", c'est le fait qu'à produit équivalent (même objet, même composition, même marque) , le produit "pour femme" est souvent... plus cher.
Je viens -comme cela m'arrive trois ou quatre fois par an- de regarder la télévision une poignée de 1/4 d'heures. L'émission "On n'est pas des pigeons" sur France 4. En gros, ils disent un peu les mêmes choses que dans "Capital", mais sans la dramatisation à 2 balles chère à l'émission de M6.
Alors ? Cette woman tax ? Ça donne ça : http://womantax.tumblr.com/
Il semble que le sujet ait déjà eu les honneurs médiatiques en 2014 :
Du coup, Bercy a lancé une enquête : http://www.huffingtonpost.fr/2014/11/03/woman-tax-bercy-enquete-produits-plus-cher-femmes_n_6092868.html
Et ? C'est tout. Sans doute un rapport sera t-il remis, et gageons que les choses n'iront pas plus loin.
Le reportage de France 4 mettait en scène une professeure de marketing, qui expliquait en substance que tout cela, c'est du "prix psychologique" : si nous achetons les rasoirs pour femmes plus chers que les rasoirs pour hommes, c'est que acceptons de les payer à ce prix là... et qu'il ne vient pas à l'idée de beaucoup de personnes d'aller comparer le prix du rasoir "pour femme" avec celui du rasoir "pour homme" : nous sommes tous plus ou moins confusément convaincu de la spécificité du produit par-rapport à notre sexe. (ça vaut ce que ça vaut, mais je viens de faire l'expérience avec ma chère et tendre : "les rasoir pour hommes ? Bah non, ce n'est pas la même chose que les rasoirs pour femmes" ; souvenez-vous de Bic qui avait habilement détourné le cliché... pour mieux le renforcer : https://www.youtube.com/watch?v=n0Z8Ne4JY7g)
De même, il ne vient pas facilement aux parents l'idée de donner l'ancien vélo rose de la grande soeur au petit dernier... on va donc acheter un autre vélo...
Vous avez pigé le topo ? Vive le marketing genré.
Bien évidemment, cette "woman tax" est en partie une illusion ; il faudrait avant tout s'interroger sur les obligations faites aux femmes de se conformer à certains standards : épilation, maquillage... Mais dans la mesure où le marketing amène les hommes à utiliser autant que les femmes des produits "de beauté" (vous noterez au passage que pour les mâles on dit "soin du corps" hein), ça devient un vrai sujet... et une inégalité de plus entre les femmes et les hommes.
Je comprends l'aspect sociologique de la chose, mais il n'en demeure pas moins que ces gens - et finalement, tous, autant que nous sommes- sont des victimes du marketing, d'une société ou tu dois consommer pour "être dans le coup"...
EDIT : voir http://www.cairn.info/revue-vingtieme-siecle-revue-d-histoire-2006-3-page-137.htm (via https://links.nekoblog.org/?S7Z0kg)
Je ne juge pas, je constate :
Après, ok, il a pas de bol : les multiples bourdes de SFR n'ont pas arrangées sa situation. Mais je me pose la question : les chaînes payantes, l'iphone, tous ces gadgets, était-ce vraiment indispensable ?
Réponse de l’auteur de l'article dans les commentaires : "l’idée n’est pas de pleurer ou quoi. Lui même ne pleure pas et comme il est dit dans le texte, « ne se plaint pas ». C’est simplement un témoignage, qui raconte les mésaventures d’un type endetté qui voulait rester ultra-connecté. Comme il en existe plein (le pôle emploi est rempli de chômeurs ultra-connectés)."
=> ok pour être "ultra-connecté", aujourd'hui c'est indispensable ; mais ça n'exige pas d'être connecté en permanence avec un joujou à 400€
Que dire de tout cela sans donner l'impression de juger ? C'est pourtant ce que je suis en train de faire, je m'en rends bien compte :/
=> ne pas s'endetter quand on est déjà endetté ? Ok, parfois on ne peut pas faire autrement d'où le point 2 :
=> éviter les futilités. Ok, mais il faut tenir compte de la pression sociale. D'où le point 3 :
=> éduquez vos enfants. On peut vivre sans iphone. On peut apprendre à gérer son budget.
M'enfin, c'est que mon avis hein.
Sinon TIL qu'il existe Préventel, un "fichier des mauvais payeurs" en téléphonie mobile => http://www.franceinfo.fr/emission/le-droit-d-info/2012-2013/preventel-le-fichier-des-mauvais-payeurs-en-telephonie-mobile-12-28-2012-16-50
Bon résumé.
via plein de shaarlistes.
Ça me fait penser que le défunt OWNI avait consacré quelques articles à ce sujet : http://owni.fr/tag/obsolescence-programmee/
Désolé pour la briéveté du commentaire, mais en découvrant cet article, j'ai fait cette tête là : :-O
via http://www.seven-ash-street.fr/links/?nDvkUw
Je suis d'accord avec toi, mais pense aussi à cette "culture de masse" que l'on tente de nous faire ingurgiter (CD, blockbusters, jeux vidéos mal finis, livres mal écrits du dernier écriniais à la mode...) : ça, c'est de la "culture" (à défaut d'un autre terme) éminemment périssable... quand elle n'est pas "à jeter"...
Comme lu dans un tweet : "L'essentiel monte le superflu baisse "
Article en relation : http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/05/03/en-dix-ans-quels-prix-ont-le-plus-augmente_4410761_4355770.html
EDIT : voir aussi http://www.mypersonnaldata.eu/shaarli/?hCB6qA, qui indique au passage les BDD sur le site de l'INSEE http://www.bdm.insee.fr/bdm2/choixCriteres.action?codeGroupe=158
Ça peut paraitre sympa, mais je suis sûr ça part d'un mauvais sentiment : Intermarché ne fait pas ça dans un souci d'écologie, de chasse au gaspillage ou je ne sais quoi, il fait ça parce qu'il pense que ça peut être rentable pour lui :
"Cette nouvelle économie là, un intellectuel américain l’a théorisée dans un livre remarquable publié en 2000 : L’âge de l’accès. L’auteur, Jeremy Rifkin, y explique ( avec de nombreuses mises en garde) que dans un Occident suréquipé, il n’y a plus rien à vendre, et surtout pas des objets (qui a besoin de 3 voitures et 4 presse-purée ?), non, tout ce qu’on peut encore imaginer monétiser, c’est l’accès à des expériences de vie dans des univers, et tout particulièrement dans le domaine culturel qui constitue le nouveau champ d’expansion du capitalisme."
Encore un article à charge contre les drives.
Voir aussi : http://sammyfisherjr.net/Shaarli/?TuTtCg
Impressionant : la plupart des marques que l'on achète, que ce soit de l'alimentation, de l'électroménager, du cosmétique des vêtements ou de la bouffe pour chien appartiennent en réalité à 10 grands groupes. 10 seulement. L'image s'appelle "illusion du choix". On comprend pourquoi.