Les journaux vont probablement beaucoup parler du fait qu'on a -probablement- retrouvé le tombe de Du Bellay, à l'intérieur de la cathédrale Notre-Dame de Paris, je suis pour ma part beaucoup plus touché par les fragments du jubé qui ont déterré lors de ces fouilles.
C'est assez fantastique : les pierres, bien conservées sous terre à l'abri de l'humidité et des champignons, portent encore des traces de la peinture du XIIIè siècle. Certains fragments, comment cette tête de Christ mort, sont d'une finesse hallucinante.
Purin, mais c'est pas possible. Quand est-ce qu'on va arrêter de recruter des branquignoles incompétents pour intervenir sur des monuments historiques ?
Parce que le feu c'est pas magique hein, ça prend pas tout seul parce que "pas d'bol" ou "qui aurait pu prédire".
Il est vraiment temps que l'Espagne se dote d'une loi pour protéger son patrimoine.
Je recopie Riff :
Des monuments historiques détruits au nom du tourisme et d'une vision "Disney" du patrimoine :
"Cette bâtisse du XVe siècle a eu la chance - ou plutôt la malchance - d’abriter Léonard de Vinci les trois dernières années de sa vie, de 1516 à 1519, alors qu’il était l’hôte en France de François Ier. La famille Saint-Bris, qui en est propriétaire, n’a eu de cesse ces dernières années de la transformer en un décor à la gloire de l’artiste et inventeur italien. L’objectif de ces travaux était bien entendu de rendre leur pureté « léonardienne » à ce manoir. On est ici dans une problématique de parc d’attraction : un atelier de Léonard totalement fantaisiste a même été « reconstitué » dans un des anciens salons du XVIIIe siècle. Inutile de dire qu’on n’a pas la moindre idée où était exactement l’atelier de Léonard, ni à quoi il ressemblait. Ce qui est certain en revanche, c’est que ce n’était pas à ça."
Ça montre clairement ce qu'est le patrimoine pour les Macron/Bern et autres : quelque chose qui doit servir non seulement à avancer un discours rance sur le "Roman National" et la "Grandeur de la France", mais surtout à attirer les touristes et à générer des bénefs, au prix d'une Disney-isation des monuments.
Suite :
On peut lire sur le site du Clos-Lucé que « 2 ans de recherche et de travaux et 15 corps de métier ont été nécessaires pour [les] restituer ». En réalité tout est faux, tout est en toc.
Il faut saluer l’action de la Direction régionale des affaires culturelles, et donc du ministère de la Culture dont elle est un service déconcentré, qui a porté l’affaire devant la justice. Mais comment ceux-ci ont-ils pu laisser l’Élysée organiser un déjeuner d’Emmanuel Macron au Clos-Lucé, alors qu’une plainte [un signalement donc, pas une plainte] pour travaux sur monument historique sans autorisation et destruction de monument historique a été déposée ?
Ce que ça m'inspire ? Que quand les GJ cassent un pétain de moulage en plâtre dans l'arc de triomphe, c'est limite un crime contre l'humanité, mais quand ce sont les bourges et les aristo qui détruisent un patrimoine classé, c'est circulez y'a rien à voir.
Le Canard Enchaîné d’aujourd’hui donne de nouveaux chiffres qui témoignent de la grande misère des monuments historiques dans notre pays, et du peu de cas que les gouvernements successifs font du patrimoine. Dans un article intitulé « Cathédrales et monuments : seuls les crédits ne flambent pas », Hervé Liffran révèle quelques chiffres stupéfiants qui confirment ce que nous dénonçons depuis toujours. On y apprend ainsi que pour 2019, l’État n’a prévu que 18 millions d’euros de crédits de paiement pour l’entretien [1] des monuments historiques lui appartenant, dont 86 cathédrales. Soit moins de 100 000 euros par monument. Il rappelle aussi que pour Notre-Dame, il avait prévu de ne donner que 40 millions pour la restauration sur les dix prochaines années, soit 4 millions par an, sur les 240 millions qui étaient alors nécessaires [2]. Pas de doute, il aura vraiment fallu un incendie pour qu’Emmanuel Macron déclare enfin sa flamme à Notre-Dame !
Pour le reste (reproduction à l'identique ou "geste architectural contemporain", je ne sais quel parti adopter. Pourquoi toutes les contributions antérieures (jusqu'à 1900 environ) seraient-elles "patrimoniales" et "classées", et pourquoi serions-nous obligés d'être figés dans un immobilisme respectueux ? Il ne faut pas oublier que Viollet le Duc a en grande partie réinterprété les canons du gothique, pour offrir sa vision de la cathédrale et que, sans son intervention, celle de Hugo et quelques autres (voir les articles précédemment shaarliés), elle aurait été probablement rasée. Oui, le XIXème siècle savait être encore plus expéditif que la XXIème.
Ce que je veux dire, c'est qu'à son époque, on ne se souciait pas de restauration respectueuse visant à conserver les vieilles pierres dans leur jus (ce qui est particulièrement peu pertinent pour une cathédrale, qui est par définition un chantier permanent ; quand tu mets 200 ans à construire un bâtiment, il ne faut pas s'étonner de devoir reprendre le chœur quand tu as fini le portail) : on rasait ce qui était trop abîmé, ou alors on reconstruisait selon l'idée qu'on se faisait alors du Moyen-Âge (pensez par exemple aux fameuses gargouilles, qu'on l'on voit sur bon nombre de couvertures du livre de Hugo, alors qu'elle ne datent pas de 1482, mais des années 1860...)
Du latin mater (mère), le matrimoine désigne l’héritage des mères. Le mot est créé sur le même modèle que le patrimoine. Il désigne comme lui nos souvenirs des créations du passé mais se concentre sur les réalisations de femmes.
Contrairement à la croyance commune, il ne s’agit pas d’une invention issue des mouvements féministes : le mot existe depuis le Moyen Âge ! Transformée, oubliée puis effacée, la notion de matrimoine refait surface depuis quelques dizaines d’années.
C'est excellent.
Je ne m'étais jamais avisé de l'étymologie du mot "patrimoine". Y'a encore du boulot...
Lien direct vers la carte : https://umap.openstreetmap.fr/fr/map/le-matrimoine-de-paris_273260#13/48.8592/2.3429
Le Conseil d’État estime que, compte tenu de la durée pendant laquelle la statuette litigieuse a été détenue par les requérantes sans initiative de l’État pour la récupérer, ces dernières peuvent effectivement se prévaloir du droit au respect de leurs biens. Il juge cependant que l’intérêt patrimonial de la statuette justifie qu’elle soit rendue à son propriétaire, c'est-à-dire à l’État, sans que soit méconnue l’exigence de respect d’un juste équilibre entre les intérêts privés de ses détenteurs et l’intérêt public majeur qui s’attache à la protection de cette œuvre d’art.
C'est particulier quand même :/
Je traduis pour les non juristes : la statue appartient à l'Etat, on reconnait quand même qu'il faut respecter la propriété privée, mais bon, rend cette fucking statue maintenant.
J'invite les malheureuses futures ex-ex-propriétaire (parce que la statuette, elles voulaient quand même la fourguer au plus offrant), et tous mes lecteur-ices, à venir fêter cette excellente décision du Conseil d'Etat au (très beau et gratuit) Musée des Beaux Arts de Dijon, où vous pourrez admirez ce que le Conseil a fait pour vous et pour la collectivité en empêchant que ce chef d'oeuvre inestimable quitte la France.
Bon. Je ne peux m'empêcher de penser qu'il y a encore eu des gabegies administrativo-politiques derrière. Le Monde nous apprend en-effet que :
En décembre 2017, Marie-Claude Le Floc’h, membre de la famille propriétaire expliquait à l’Agence France-Presse : « Nous avons envisagé de la céder à un musée à la mort de ma mère, mais personne ne voulait l’acheter, ni le Louvre ni l’Etat. On a finalement décidé de la mettre en vente fin 2014 en demandant une autorisation de sortie du territoire [ce que le ministère de la culture a refusé]. »
Bizarre non ?
« Cette fameuse affaire de la tapisserie de Bayeux et je dois dire que c’est une sacré opportunité, c’est comme ça que les échanges s’entendent, c’est-à-dire que c’est pas simplement l’idée de prendre la pâti… La pâtisserie ! [elle rit] la tapisserie de Bayeux et de l’amener là bas, ce qui est d’ailleurs intéressant parce que ça dit quelque chose de notre histoire commune qui montre aussi l’éveil qu’ils ont par rapport à montrer quel est… c’est la première bande dessinée historique je dirais d’une certaine façon et donc qui montre leur intérêt à connaître l’histoire telle qu’elle est hein, c’est quand même intéressant en plus de ça en ne sachant pas si elle n’a pas été tissée là bas. Donc tout ça montre comment tout est étroitement tissé si je peux me permettre et c’est à la faveur de cet échange évidemment qu’est-ce que ça veut dire ; ça veut dire on va, une fois que les conditions seront, bien de préservation seront bien établies parce que la dernière fois où elle a été bougé c’était pendant la guerre pour la préserver justement et elle a été roulée donc il ne faut pas trop faire ce genre d’opération mais enfin elles sont possibles aussi puisque elle avait été faite. Mais à la faveur de cette réflexion sur l’échange et bien, la tapisserie va être consolidée, restaurée je ne sais pas si on peut dire c’est le bon terme, documentée aussi, on va utiliser tous les moyens du numérique pour raconter, voir quelle est vraiment son histoire, garder une trace numérique et à la faveur des travaux, heu, du… , c’est un musée, c’est un ? [elle cherche dans ses notes] oui c’est un musée hein. A la faveur du musée de Bayeux qui devrait réouvrir en 2023 si je ne me trompe et bien elle pourrait, une fois toutes les conditions réunies et avec la participation active à tous les niveaux et notamment financières des Anglais qui nous aideront à faire les travaux de restauration et de documentation nécessaires, elles seront un parfait symbole de cet échange. Je trouve que c’est, je vous remercie d’avoir commencer par ça car c’est très donnant-donnant, c’est un parfait exemple de coopération. »
Pour expliciter la hargne de mon shaare précédent. Il faut lire tout l'article bien sûr, j'ai choisis ce passage car c'est le plus "drôle". On va dire ça comme ça.
Le Framablog avait raconté cette histoire dans un article de 2012 que j'avais adoré : https://framablog.org/2012/05/15/urban-experiment-hacker/
Le blog d'une archiviste.
Site perso : http://camicaos.com/
L'ebook du XVIIème siècle ! :) (lien d'origine : http://www.dailymail.co.uk/news/article-2781378/First-kind-Kindle-Researchers-University-Leeds-thought-travel-sized-library.html eng.)
Par-contre, il y a une grosse erreur de traduction : "jacobean" ne se traduit pas par "jacobin", mais plutôt par "jacobite", en référence à Jacques VI : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_VI_d%27%C3%89cosse_et_Ier_d%27Angleterre
EDIT : l'auteur de l'article a modifié suite à ma remarque :)
J'adore l'approche de @GallicaBnF pour partager les documents anciens.
La British Library vient de publier sur son site une carte interactive mondiale des archives en voie de disparition.
Lien direct vers la carte : http://eap.bl.uk/database/map.a4d
Quel gâchis :(
En même temps, la conception même de cette bibliothèque est une gabegie de A à Z : abriter des collections patrimoniales dans des tours, déjà ça se pose là... (la plupart des grandes bibliothèques modernes de conservation sont enterrées ou semi-enterrées) ; il a fallu rajouter les fameux panneaux en bois après coup, pour protéger les collections de la lumière... et accessoirement aussi les humains qui y travaillent.
Pour ce qui est de l'eau, même sans compter les problèmes de canalisation, les sous-sols sont ruisselant (je l'ai visitée il y a une quinzaine d'années) : on est à la fois sous le niveau et à côté de la Seine, c'est aussi simple que ça...
Dispersion du patrimoine culturel, économies sur le dos de la science et de la recherche, censure... pas joli, joli le Canada.
Perte pour le futur de ressources scientifiques : "Résolu à démanteler plusieurs bibliothèques scientifiques pour des raisons budgétaires, le gouvernement canadien est accusé d'avoir dispersé ou mis au pilon des documents rares, certains irremplaçables pour la recherche en sciences de l'environnement."
Censure : "« Le gouvernement assure que seuls les documents présents en double ont été distribués mais de ce que j'ai pu voir, le processus s'est fait sans contrôle, poursuit ce scientifique qui a requis l'anonymat, le gouvernement imposant depuis 2008 aux chercheurs fédéraux de faire viser leurs déclarations publiques par leur ministère de tutelle."
Le but ? A votre avis ? "Par exemple, pour éviter que des découvertes gênantes ne soient faites sur l'exploitation des hydrocarbures, on ferme les laboratoires d'écotoxicologie. Cela fonctionne désormais comme cela au Canada et c'est extrêmement grave. Nous dérivons vers une pétrodictature."
Vous ne voudriez pas foutre le feu aux livres jetés dans les conteneurs ? Juste pour l'image, dites...
"Voilà ce qui arrive aux pays qui imposent des lois abusives en matière de copyright. Non seulement elles empêchent les artistes d’aujourd’hui de créer leurs œuvres en s’appuyant sur celles de leurs prédécesseurs — une pratique qui était habituelle pendant des siècles avant que n’apparaissent récemment les monopoles intellectuels — mais ces lois vont jusqu’à mettre en péril la conservation et la transmission de cultures entières, tout cela en raison du refus des éditeurs d’adapter la règlementation du copyright à notre temps, c’est-à-dire d’autoriser la numérisation à grande échelle et la diffusion à la façon dont la Norvège l’envisage."
C'est marrant, je ne lui donnais pas cette tête là à Apollinaire.