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Everything, Everywhere, All at Once
vendredi 24 mars 2023, par
Vous ne pouvez pas ne pas avoir entendu parler d’Everything, Everywhere, All at once, ce film onze fois nominé aux Oscars et ayant remporté 7 récompenses. Personnellement, c’est ce succès surprise qui me l’a fait découvrir, mais je dois confesser ne pas vraiment suivre l’actualité cinématographique.
Qu’en dire sans rien révéler ? Commencez plutôt par regarder la bande-annonce, c’est elle qui m’a donnée envie de voir le film :
C’est long (2h30) mais on ne s’ennuie pas. Ça part dans tous les sens, mais ce n’est pas si compliqué que ça, une fois qu’on a accepté ce principe du multivers constitué de tous les choix faits dans l’univers ; il existe donc une infinité d’Evelyn, une infinité de Waymond (son mari), et la possibilité de faire appel à leurs capacités, moyennant des conditions loufoques.
Autant être clair : c’est complètement barré. C’est une comédie fantastique sur les univers parallèles, avec des googgly eyes et du kung-fu. Et des références à la pelle, dont Matrix, Ratatouille, Kill Bill, 2001... pour ne citer que les plus visibles. Et aussi une petite touche d’humour gras parce que le gras c’est la vie.
Le pitch du film, c’est qu’Evelyn, sino-américaine d’une cinquantaine d’année, se débattant avec les impôts qu’elle ne comprend pas, son père qui ne la comprend pas, sa fille qui ne comprend rien et son mari qui ne la comprend plus, va devoir sauver, non le monde, pas l’univers non plus, mais l’ensemble des univers existant, menacés par une chose terrible...
Michelle Yeoh est une référence à elle toute seule (ce n’est pas une façon de parler mais je ne spoilerai pas) et je vois une référence directe aux Goonies, à travers la banane [1] de Waymond, joué par Ke Huy Quan, dont il fait un usage... particulier dans une scène qui m’a fait rire aux éclats. Et qui m’a donc rappelé la fameuse ceinture gadget de Data. Ah, oui, si vous n’aviez pas encore fait le rapprochement : Ke Huy Quan jouait Data dans Les Goonies [2].
Puisque je parle des acteurs, évoquons brièvement Jamie Lee Curtis, évidemment excellente, et la supra-hyper-mega-formidable Stéphanie Hsu : c’est bien simple, elle tient tout le film sur ses épaules, même si on ne s’y attend pas lors de ses premières minutes à l’écran. Elle m’a éclaté avec les dizaines de costumes [3] qu’elle porte tout au long du film, et toutes les attitudes différentes qu’elle joue [4]
Mais je sens que j’en ai déjà trop dit.
Attention, le vrai spoiler commence juste après, cessez immédiatement de lire si vous voulez garder la surprise [5].
SPOILER SPOILER SPOILER
Au final, EEAAO est une grosse machine qui délivre un message très simple sur l’amour, l’écoute et la bienveillance. Attention, je ne suis pas en train de dire « c’est juste ça » ou « tout ça pour ça », parce que j’ai vraiment passé un bon moment, et aussi parce que je pense que ce sont des valeurs à même, littéralement, de sauver le monde.
Puisque vous êtes là, révélons tout de suite le fin mot de l’histoire : la terrible menace évoquée plus haut n’est autre Joy, la fille d’Evelyn. Dans un autre univers, celui où à vrai dire tout a commencé, Alpha-Evelyn, après avoir découvert les univers parallèles et la façon de sauter de l’un à l’autre, a un peu trop forcé sur les capacités de sa fille, au point de scinder son esprit en autant de morceaux qu’il existe d’univers... Depuis, elle est devenue une entité nihiliste (re)nommée Jobu Tupaki, dont le seul but est de tout faire disparaître. Les univers, les gens, les googly eyes, tout. Parce que si tout est possible, est-ce que cela ne veut pas dire qu’au final, rien n’a d’importance ?
Et puis on avance dans le film et on apprend que c’est surtout elle qu’elle voulait détruire [6], mais qu’elle voulait avant cela rencontrer Evelyn, mais la « bonne » Evelyn, celle qui ne comprend plus rien à sa famille, et que Alpha-Waymond et les gens de son monde, de leur côté, considèrent comme l’Élue, la seule à même de lutter contre Jobu Tupaki, justement parce qu’elle a tout raté...
Mais il n’en en demeure pas moins qu’au bout de 2h30 de visionnage, on se rend compte que le propos du film est très simple : il est question de la difficulté des relations mère-fille, surtout quand la mère est une immigrée chinoise qui accepte mal que sa fille soit lesbienne, il est question aussi des différentes façon de lutter. On peut distribuer les pains (ou les bagels), on peut aussi partager l’amour. C’est le discours d’un Waymond complètement paumé, au milieu d’une baston cyclopéenne à laquelle il ne comprend que pouic, qui est le tournant du film : est-ce qu’on ne peut pas simplement être gentil ?
Loin d’être mièvre, cette question va bouleverser toutes les Evelyn du multivers, et changer le cours d’une histoire qu’on croyait pliée. Et c’est plus important qu’il n’y parait. Il est même des commentaires pour expliquer, et je trouve ça très pertinent, que Waymond est un avatar de la masculinité positive. A première vue, Waymond est doux, gaffeur, naïf, maladroit... Généralement, au cinéma, ces traits sont associés à des personnages faibles, ou peu valorisés. Comme l’explique l’article que je cite, Waymond, qui demeure le même du début à la fin du film, devient le point d’ancrage autour duquel tout le reste s’articule. Sa présence empathique est rassurante, sa gentillesse, de mollassonne au début, devient exemplaire. Son humour devient son moyen de lutte.
Partout, tout le temps, tout le monde a besoin de Waymond.
Je sens que j’ai un peu abusé des illustrations dans cet article.
Désolé, je n’ai pas pu choisir, je les aime toutes 😊
[1] je parle de la pochette qu’il porte à la taille, pas du fruit
[2] Et je ne vous donne pas l’année pour ne pas vous faire pleurer.
[3] Évidement, c’est devenu le thème tendance pour Halloween, attention : spoilers
[4] Vous voyez Henry Cavill ? Ben elle c’est l’inverse.
[5] d’un autre côté, est-ce si grave ? Dans une infinité d’univers parallèles, il y a une infinité de vous alternatifs qui ont déjà vus le film, une infinité qui ne l’ont pas encore vu, et une infinité qui s’en foutent...
[6] en se jetant dans un trou noir en forme de bagel, mais n’est ce pas la vérité que les trous ressemblent à des bagel ?