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Le problème à trois corps

mercredi 20 mars 2024, par Sammy

L’espace... frontière de l’infini... Ah non, ça c’est Star Trek. Dans Star Trek, tout le monde il est gentil et on règle les problèmes par la diplomatie. Dans Le problème à 3 corps, l’univers il est MÉCHANT.

Ça commence doucement, tout doucement (c’est un gros livre), on met du temps à comprendre qu’on va nous révéler une invasion extra-terrestre... Alors oui, je suis désolé de spoiler, mais c’est l’éditeur qui a commencé en l’écrivant sur la 4ème de couverture. Et la série Netflix qui débarque [1] avec ses gros sabots (100 millions de $ à chaque pieds si j’ai bien suivi) ne se soucie absolument pas de l’effet de surprise qui faisait tout le charme de ce premier volume.

Parce qu’on part de loin, tant dans le temps que dans le mais-c’est-quoi-le-rapport : le début du roman prend son temps, l’histoire commençant dans la riante Chine de la Révolution Culturelle, s’attache aux pas d’une jeune scientifique tellement convaincue par le maoïsme qu’elle préfère arrêter la recherche et partir couper du bois, mais elle aura son heure plus tard ; on revient petit à petit à l’époque contemporaine où les problèmes -sérieux mais encore cachés au public- s’accumulent comme les guêpes au-dessus d’un pique-nique : les lois de la physique, que l’on pensait universelles, semblent avoir cessées de l’être, et nombre de physiciens et scientifiques de premier plan, déroutés par un tel comportement, se suicident à tour de bras. On est a priori très loin de La guerre des mondes et des aliens humanicides, et pourtant...

C’est le début du roman, et d’une trilogie d’ampleur ; juste le début. Je n’en dis pas plus, parce que si vous allez au bout, ça va vous emmener loin, très loin. Non, plus loin que ça encore. Si vous êtes lassés des univers prévisibles et sans imagination, si vous pestez contre les inventions peu crédibles ou les récits accumulant les invraisemblances, si vous avez envie de dépaysement littéraire... lisez Le problème à trois corps et les deux tomes suivants : La forêt sombre et La mort immortelle. Si vous ne craignez pas les histoires au long cours, ni les références sinisantes (et c’est plutôt rafraîchissant, ça change des références occidentalo-centrées) : foncez.

Je me décide à écrire cet article à cause de l’adaptation Netflix tirée de cette trilogie, et si j’ai l’occasion de la voir, je ne voulais pas être amené à en parler sans avoir préalablement parlé des livres. Et j’espère, du haut de cette microscopique chaire virtuelle, convaincre le plus possible de personnes de lire les livres avant de regarder la série. Déjà parce que vous n’aurez plus envie après, et sans doute aussi parce que si je vois tout à fait comment on peut adapter le premier livre (et comment ça peut être grandiose si c’est bien fait), si je vois à peu près comment on peut adapter le second (et comment ça peut être très triste si c’est pas très bien fait, parce que ça commence déjà à partir loin), je vois surtout très bien comment ça peut se planter pour le troisième. Oh oui, je vois bien.

Si ce cycle romanesque est clairement à rattacher au sous-genre de la hard-SF, l’auteur s’appuyant sur les connaissances et la prospective actuelles pour aller plus loin avec l’imagination, il crée avant tout une histoire que n’êtes pas près d’oublier. L’ensemble est tellement construit, logique jusque dans ses moments les plus incroyables, qu’on se surprend à penser en cours de lecture qu’on est vraiment dans le pétrin... Il m’a fallu du temps pour me convaincre que ce n’était qu’un roman, et pas une prophétie des siècles à venir ! Au cours des trois tomes, Liu Cixin apportera ainsi son interprétation du paradoxe de Fermi, tout en tissant une histoire à l’échelle de l’univers. Comme l’histoire devient aussi un space opera, vous aurez tout l’attirail incontournable du genre : vaisseaux gigantesques, combats spatiaux, civilisations extraterrestres...

Quel que soit votre choix, le livre, la série ou les deux, lisez-en le moins possible sur le web : il n’est pas jusqu’à l’article de France Info qui n’en dise trop, citant inutilement le communiqué de presse. Autorisez-vous la surprise. Si vous vous en laissez le temps (2000 pages au total - le premier tome n’est qu’une mise en bouche), vous verrez que ça valait vraiment le coup.


[1demain, jeudi 21 mars 2024